Jeu : Remember me

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Après bien des années de développement et de galères, notamment pour trouver un éditeur, le studio Dontnod a enfin accouché de son jeu. Et si nombre de jeunes développeurs parisiens auraient opté pour un titre casual sur smartphones pour leur premier projet, Dontnod n'est pas de ceux-là et s'attaque d'entrée à un mélange d'action aventure très ambitieux, dans un univers SF qui ne l'est pas moins. Le résultat s’appelle Remember Me et ... Arf, quelle tuile ! On a oublié la chute !!

Les jeux vidéo se déroulant à Paris sont rares, très rares, et ceux se laissant aller à imaginer notre belle capitale dans son état futur le sont encore plus. À vrai dire, de mémoire de joueur, nous n’avions jamais évolué dans un univers semblable à celui qui nous est proposé ici par Dontnod. Référence évidente au Neo Tokyo d’Akira, le Neo Paris dans lequel vit Nilin, l'héroïne du titre, est très certainement la première star de Remember Me. Ainsi, l'équipe française a réussi l’exploit de s’approprier les symboles que sont les immeubles Haussmanniens, les terrasses de café, ou les rues pavées, d'y ajouter une couche cyber - Blade Runner ou Minority Report sont les références qui nous sont immédiatement venues à l'esprit concernant cet aspect - pour finalement former un tout cohérent et visuellement très impressionnant. Malgré l’utilisation d’un moteur graphique vieillissant (l’Unreal Engine 3), chaque panorama extérieur est saisissant de beauté et l’on ne peut s’empêcher de s’arrêter devant ce parvis de Notre Dame entouré de buildings gigantesques, ou face à ces vitrines de restaurants typiques et agrémentées d’écrans holographiques.
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Mais on parle, on se pâme devant la direction artistique splendide du jeu, et on oublie du coup de replacer le jeu dans son contexte : vous incarnez donc Nilin, une chasseuse de souvenirs en 2084, une époque où la mémoire est devenue une donnée numérique qui s'échange entre citoyens grâce à une technologie développée par la toute puissante compagnie Memorize. Fidèle à la grande tradition des univers Cyberpunk, Memorize est une mega corporation qui tire les ficelles d’une société à la dérive, et pour laquelle ce commerce des souvenirs reste l'équivalent d'une drogue destructrice. Prise en main par Edge, mystérieux leader d’un groupe luttant contre Memorize, Nilin va devoir mettre fin à l’oppresseur, tout en tentant de retrouver sa mémoire perdue. Bon, soyons honnêtes : autant l’univers développé autour de Neo Paris est absolument passionnant, autant le scénario principal et la quête d’identité de l’héroïne nous ont paru cousus de fil blanc. Même si l’ensemble se suit sans déplaisir, le contraste entre ces deux aspects fait un peu tache. Une dualité que l'on retrouvera par ailleurs dans bien d'autres aspects du jeu...
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Car si l’on a longuement évoqué la magnificence de Neo Paris en début d’article, nous avons oublié de préciser que, en lieu et place d’une capitale européenne, nous avons surtout droit à un immense couloir qui n’autorise que très peu d’exploration. La progression de Nilin est ainsi des plus linéaires, le titre ayant même le mauvais gout de nous indiquer constamment la prochaine plateforme à prendre ou le muret le plus proche. Du coup, les (nombreux) passages de grimpette, façon Tomb Raider ou Uncharted sur PS3, sont une formalité, et deviennent vite lassants, exception faite de quelques scènes un peu plus pêchues, où l’on doit par exemple escalader le plus vite possible un immeuble pour échapper aux tirs d’un hélicoptère. Dontnod s’est contenté ici d’appliquer des recettes ultra connues sans y apporter de valeur ajoutée, et c’est vraiment dommage.

La reine du combo, la petite soeur de Colombo

Heureusement, le gameplay du titre montre en parallèle bien d’autres facettes. L’aspect beat’ am all, notamment, est une réussite : même si le rythme des combos, très particulier, et le système de customisation des coups, un peu confus, déconcertent dans un premier temps, on progresse, on débloque de nouveaux pouvoirs et on se laisse finalement emporter par ces bastons très aériennes, qui ont parfois l’air d’un balai majestueux, et qui laissent la place à beaucoup plus de subtilité qu’il n’y parait. On regrette par contre qu’elles soient toujours amenées de la même façon : après une enfilade de couloirs, Nilin atterrit dans une grande arène et doit se fader une grosse poignée d’ennemis avant de pouvoir continuer à avancer. Bref, sur ce point, là encore, Les développeurs n'ont fait que reproduire un schéma datant des années 90.
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Enfin, il y a les Memory Remix, véritables jeux dans le jeu, au concept très audacieux : à plusieurs reprises, Nilin doit modifier le souvenir d’une personne, en exploitant les failles de ce dernier. À l’écran, vous voyez la scène défiler, telle que se la rappelle le sujet. Une fois celle-ci terminée, vous pouvez rembobiner ou avancer, afin de trouver les éléments avec lesquelles interagir. Le but est de savoir lequel utiliser et à quel moment, pour déclencher une série d’évènements qui va aboutir à la modification voulue du souvenir. C’est certes difficile à expliquer sur le papier, mais l’idée et l’exécution sont excellentes, et on se croirait dans une sorte d’Inception du jeu d’aventure. Seul regret : ces séquences sont finalement assez rares et laissent véritablement un gout de trop peu.
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Vous l’aurez peut-être compris à la lecture de ce test : Remember Me est un jeu rempli de paradoxes. Dontnod navigue constamment entre l’excellence d’un univers très travaillé, ou de quelques bonnes idées de gameplay et la déception devant certains choix de game design vieillots. Rien n’est vraiment raté, rassurez-vous, mais le titre a le malheur d’arrivée après Tomb Raider, Batman, Uncharted et consorts, qui ont placé la barre tellement haut en matière d’action-aventure qu’il semble bien difficile de lutter. Mais ce serait dommage de s’arrêter à ça, puisque l’aventure de Nilin se vit malgré tout avec beaucoup de plaisir. Et puis, rien que pour le Neo Paris imaginé par le studio, le voyage vaut le coup.
( Source : pcworld.fr )